Pendant un siècle, les vanniers ont eu pignon sur rue à Hérépian, tressant des corbeilles utiles aux éleveurs et maraîchers. Nostalgie...

A la fin du siècle dernier, vers les années 1880, Hérépian connaissait une activité artisanale intimement liée au travail de la terre, et plus spécialement à la culture maraîchère : la vannerie. La production était utilisée par une dizaine de jardiniers d'Hérépian et Bédarieux pour le transport, par train, de fruits et légumes à destination de Béziers, mais aussi par les éleveurs pour le transport de la viande d'agneau vers l'Aveyron, la Lozère et le Cantal. Descendants des premiers vanniers, Félicien et Pierre Bernard, dit "Cadet", savent à merveille égrenner l'album de souvenirs des vanniers d'Hérépian, qui constitue aussi un témoignage de la vie rurale pendant près d'un siècle, jusqu' à 1970, année de cessation de leur activité . Pour Midi Libre, Pierre Bernard parle d'un temps où les vanniers hérépianais tressaient le châtaignier.

• Où s'étaient installés les premiers vanniers d'Hérépian? Le quartier des vanniers était implanté dans la partie basse du village, au carrefour de l'actuelle avenue de la République et de l'avenue Marcellin Albert. Il existe d'ailleurs de nos jours une rue dénommée "chemin des van­niers", qui leur permettait d'aller se ravitailler en matériaux à la rivière Orb. Félicien et "Cadet" exerçaient leur métier sur le trottoir l'été, faisant ainsi, par la même occasion, leur autopublicité.

• Combien y avait-il de vanniers à Hérépian ?

Hormis l'entreprise de la famille Bernard, Hérépian comptait 4 autres vanniers : Courtes, qui apprit le métier à Marcel Granier, qui transmit par la suite son savoir-faire à MM. Monnedero, Coutouli et Claude Fabre. Dans les années 1970, il ne restait que deux vanniers en activité, MM. Louis Bernard et Claude Fabre. C'est donc pendant 90 années que la vannerie eut droit de cité à Hérépian, en partie grâce aux fils de "cadet" Bernard, Jean et Bertin, de son gendre Fernand Bouisset, et du fils de Jean, Louis. • Quels étaient les matériaux utilisés pour la vannerie?• Essentiellement du châtaignier, dit "bois taillés" .

Le bois adulte, de 6 ans servait à fabriquer l'ossature, ou squelette, de la corbeille, tandis que le tressage final utilisait du bois de châtaignier très fin, de 2 ans d'âge. Ces bois étaient coupés à la fin de l'hiver dans les environs d'Hérépian.

• Comment préparait-on le bois?

• Après la coupe, les épouses des vanniers nettoyaient le bois, avant de le stocker en vue de le sécher complète­ ment. Venait ensuite la phase de trempage dans l'eau de l'Orb, lesté avec des pierres pour qu'il ne remonte pas à la surface. Cette opération durait une quinzaine de jours. Le bois devenait alors souple, et en le chauffant dans la che­ minée, on pouvait le tresser aisément.

• Quel type de corbeilles confectionnait-on ?

* Leurs dimensions, et donc leurs poids, variaient selon l'usage que voulaient en faire les acheteurs. Celles destinées au transport de la viande mesuraient 1,2 m sur 0,8 m, leur leur poids, avec le couvercle, pouvait atteindre 30 kg. Quant à celles des jardiniers, plus petites, elles mesuraient 0,8m par 0,5m, d'une profondeur de 0,2 m à 0,3 m, elles pesaient, avec leurs couvercles, 10 à 15 kg. Toutes ces corbeilles étaient munies de poignées pour le transport.

• Quels ont été vos sentiments à la clôture de cette activité ?

D'abord la nostalgie de ce temps où l'on pouvait voir travailler ces artisans, admirer leur savoir-faire, et bien sûr de la tristesse car, pour la plupart, ils faisaient partie de ma famille. Mais surtout des regrets de voir disparaître peu à peu tous ces petits métiers, témoins d'une époque révolue où le monde ne connaissait pas, ou très peu, le chômage, cette époque où les gens étaient heureux de vivre, en toute convivialité.

Propos recueillis par C.D. pour Midi Libre