Souvenirs d'enfance après 1955 par ggderepio

Nous les garcons nous allions jouer avec des arcs et des flèches . Ces armes étaient taillées dans le bois d'osier. Nos champs de batailles se situaient dans les « bédis » ; végétation en bordure des rivières notamment celle de l'Orb. La tête nous gratouillait à cause des bestioles qui venaient se loger dans nos cheveux lorsque nous traversions ces buissons.A la belle saison nous allions nous « baquer » Beaucoup d'entre nous apprener à nager à la rivière, car à l'époque la piscine la plus proche était à Narbonne ! Nos plages étaient « le fort d'Insa » , la « grotte »,la « pansière » . le »trénagos » même le « ripourquier » ! Au Rieu Pourquié à la hauteur du chemin de l'ancien relai existait une retenue d'eau. Derrière celle-ci s'était formé un trou assez vaste pour que l'on puisse venir s'y ébattre . C'était un endroit bordé d'arbres en pleine campagne. Quelquefois un viticulteur nettoyait sa sulfateuse en amont. L'eau devenait bleue ! On avait déjà  notre piscine  ! Aujourd'hui le passant que je suis entend encore les cris d'enfants joyeux !

Même les enfants de païens suivaient le « caté » , le « catoch ». Sitôt nés nous étions baptisés et à douze ans nous faisions la « communion »! beaucoup languissaient ce jour pour avoir des cadeaux ! Cette cérémonie était précédée de la retraite . La première occasion de réunir filles et garçons c'était l'église qui le faisait , car l'école laïque était scindée : école de filles , école de garçons. A cette époque venir à la messe était une sorte de spectacle car un curé talentueux faisait des prêches dignes des contes d'Alphonse Daudet. Ses sermons collait l'actualité locale , il fallait savoir « lire entre les lignes ». Mais son talent d'orateur ne s'arrêter pas aux faits divers , bien de communiants et parents ont pleurés le jour de la communion solennelle. Après douze ans , si on n' était pas « acolyte » on pouvait monter à la tribune. Nous étions tout en haut , et l'on s'amusait de voir les rayons de soleil passant à travers le vitrail de la rosace ,teintés de diverses couleurs , caresser les calvities des anciens.

Que de changements technologiques depuis ! Le premier poste de télévision à Hérépian arriva chez Roland Granier , à la station service du fond du village.Il pouvait capter les signaux émis par le relais du Pic de Tantajo ! Le jeudi après midi , jour ou il n'y avait pas école , il invitait volontiers les enfants à venir voir la télé. Il n'y avait qu'une seule chaine , en noir et blanc , des coupures intempestives pertubaient le programme. Entre les émissions , pour meubler les trous , l'ORTF diffusait des interludes , avec des rébus à trouver sur un petit train en marche.

Quelques mois suffisaient pour nous rendre plus gaillard. Un grand de Villemagne , une coudène , faisait du scoutisme . Il était déjà gradé dans cette corporation et n'a pas tardé à enroler trois des nôtres . Les trois compères devaient faire leur « BA » quotidienne. Pour rappel il s'agissait d'accomplir une bonne action. , Entre nous , on pouvait rire sous cape quand on connaissait les chenapans ! L'uniforme fut de rigueur ! Avec le béret s'il vous plait ! Il s'étaient même muni d'un grand bâton de marche , gros comme un « païssel » ! Une soirée autour d'un feu de bois fut organisée. Elle se tenait dans un champs près de la gare de chemin de fer . A cette occasion nos trois louveteaux qui espéraient monter rapidement en grade pour accéder au titre d'éclaireur , firent leur promesse de servir loyalement le mouvement de Baden-Powell.

Le chef coudène menait rondement son affaire , il fallait endurcir ces tuques molles ! Faut leur donner un esprit tonique , un corps vigoureux , et en pleine santé ! "Je vais leur inculquer les techniques de vie dans la nature en leur faisant passer une nuit sous toile de tente , loin de la maison" , décida le chef.

Le grand événement arriva ! La troupe s'ébranla pour gravir le sentier qui monte à Capimont. Tout le matériel de bivouac était réparti dans les sacs à dos , des sacs « tyroliens » . Ces sortes des sacs jaune pale en forme de poire.

"Va d’un bon pas, ne faiblis pas,
La route est ta meilleure amie mon gars,
Oui mon gars !
Va d’un bon pas, ne faiblis pas,
C’est une amie comme il n’y en pas,
Oui mon gars !"

Ils devaient chantonner ces chants scout en montant les flancs du Mazelet, heureux de vivre une nuit comme ces héros de film de cowboys que l'on voit au « cinoche » de Marceau.

Au beau milieu de la nuit un orage survint. Les mères qui ne pouvaient trouver le sommeil se firent un sang d'encre si bien que l'une d'entre elles organisa une expédition spontanée. Pas d 'appel aux pompiers , les communications numériques n'existaient pas . Les lampes de poche à la main , imperméables sur les épaules , deux mamans partirent sous la pluie pour Capimont. La route goudronnée fut construire bien plus tard ce qui rend la performance de ces dames fort honorable. La recherche ne dura pas très longtemps car nos héros , pas si sots , avaient planté leur toile sous la marquise ! Ils dormaient à poings fermés quand ils furent sortis de leur sacs à viande, mis à nus et frictionnés énergiquement au trois-six !

O terrible humiliation ,

On ne revit plus le chef coudène.

retour